Module d'eau "Hawai", du designer André Paquelet (modèle déposé) et façonné par Bleu ardoise. Photo Monagraphic.

 

Tout le monde connaît l’ardoise. Elle couvre une grande partie des toits de la partie ouest de la France et elle se trouve en grande quantité dans notre sol. Pourtant on l’utilise bien peu pour les plans de travail pour lesquels on continue de préférer le granit et les matières thermoplastiques. Ouvrons le dossier d’une matière qui possède suffisamment de qualités pour mériter une meilleure place dans la cuisine.


« Plus que le marbre dur me plaît l’ardoise fine. » Avec ce vers tiré du célèbre poème Heureux qui comme Ulysse du recueil Les Regrets, Joachim du Bellay fait un choix esthétique auquel devrait être sensible une grande partie des Français qui vivent ce matériau au quotidien. En effet, l’ardoise est très présente dans l’Ouest de la France (Anjou et Bretagne) et se retrouve également dans les Ardennes et quelques zones du Sud-Ouest. Il s’agit d’une roche métamorphique, comme le marbre, qui appartient à la famille des schistes. Résistante, elle présente un grain très fin et une structure en feuillets. Bien qu’on la connaisse surtout sous la robe gris bleu (la couleur ardoise) caractéristiques des toits de la France occidentale, elle se retrouve sous bien d’autres teintes allant du blanc au noir en passant par des rouges sombres, des violines et différents verts. Elle se rencontre également avec des motifs de rouge oxydé sur une base grise ou verte. Ils témoignent de la présence d’oxyde de fer.

De nombreuses finitions

L’apparence de l’ardoise varie également en fonction de la finition employée pour le plan de travail. L’une des plus fréquemment choisie est le clivé qui affiche un aspect brut aux reliefs bien marqués sur la face du dessus. Le vieilli expose en revanche un fini naturel enrichi d’un effet patiné évoquant le vieillissement. Enfin, l’adouci présente un doux poli-satiné, lui aussi vieilli. La face du dessous est quant à elle rabotée (les ardoisiers parlent d’un aspect dressé). Les plans de travail en ardoise sont réalisés dans les épaisseurs classiques de la pierre et du granit : entre 30 et 40 mm. Leur façonnage permet de graver des égouttoirs et d’intégrer des cuves d’évier et de traiter les chants de façon élégante : moulures en quart-de-rond, chanfreinées, brutes, feuillurées, biseautées… Bref, l’ardoise propose une telle richesse d’apparences, de coloris et de finitions qu’aucun plan de travail ne ressemblera exactement à un autre.

Module d'eau "Hawai", du designer André Paquelet (modèle déposé) et façonné par Bleu ardoise. Photo Monagraphic.

Ses qualités

Un toit couvert d’ardoises de bonne qualité peut résister au moins 70 à 300 ans. Dès lors, il paraît raisonnable d’utiliser cette roche dans le cadre de la cuisine. Son premier atout, c’est justement son imperméabilité : comme elle ne laisse pas passer l’eau de pluie dans une maison, elle fera a fortiori un barrage efficace sur un plan de travail. Mais les fabricants prennent la peine de l’améliorer encore grâce à un traitement spécial. On craint en revanche sa fragilité car on voit souvent des ardoises de toit brisées. On oublie un peu vite que c’est leur finesse qui facilite la cassure. En réalité, le coefficient de résistance aux chocs de l’ardoise est équivalent à celui du granit. Certaines taches peuvent certes la marquer, mais c’est le cas de tous les matériaux naturels, granit compris. Et comme tous ces derniers, l’ardoise doit subir un traitement avec une résine protectrice. Enfin, à l’instar de tout autre matériau de plan de travail, il n’est pas conseillé de couper directement sur son plan de travail si l’on ne veut pas la rayer.

Pas plus chère que le granit

Reste la question du prix. L’ardoise se classe, bien entendu, dans les revêtements haut de gamme. Mais elle n’est pas plus chère que le granit ou les pierres de synthèse. En outre, c’est un matériau que l’on peut se procurer facilement en France puisque notre pays ne manque pas d’ardoisières. Souhaitons simplement que la plupart d’entre-elles, qui ont été fermées dans les années 60 et 70- notamment celles de Bretagne -, soient rouvertes. Quoi de plus logique, à une époque où fleurit le slogan « consommez local !»

 

Légendes

1) L’agencement en presqu’île est surmonté d’un élégant plan fonctionnel évier et plan snack en ardoise verte moirée. Module d’eau « Hawai » créé par le designer André Paquelet (modèle déposé) et façonné par Bleu ardoise. Photo Monagraphic.
2) Détail des moulures et des finitions qui jouent sur les différentes facettes esthétiques de l’ardoise. Bleu ardoise.